«Le rire est le plus court chemin entre deux personnes»
Charlie Chaplin
Un proverbe yiddish dit : «C'est un plaisir de raconter les ennuis
passés». Cette phrase pourrait résumer l'humour juif. D'autant qu'au
cours de sa longue histoire, le peuple élu a eu le temps, depuis
l'Egypte, d'accumuler des siècles d'ostracisme et de tracas. Au point
d'inspirer cette question adressée à Dieu : «Seigneur, tu nous as
choisis entre tous les peuples. Pourquoi fallait-il que tu tombes
justement sur les Juifs ?» Au point aussi d'influer sur la pratique
musicale de Woody Allen. À quelqu'un qui lui demandait la raison qui
l'avait poussé à abandonner le saxophone pour la clarinette, il
répondit : «C'est moins encombrant à emporter en cas de pogrom !».
Autre particularité : il ne fait pas de victime. De manière sensible et
discrète, il débusque, par touches légères, les travers des uns et des
autres. Ici l'hypocrisie, là l'arrogance, un peu plus loin la fatuité.
Il ne juge pas, il rit affectueusement. Indulgent et respectueux, il ne
cherche ni à détruire, ni à blesser. Il évite de ridiculiser et
n'humilie ni ne rejette personne.
L'auteur Moïse Rahmani, dans ce livre a rassemblé histoires, anecdotes,
dictons, proverbes, devinettes qu'il a commencé à glaner dans son
enfance et qu'il n'a cessé de savourer et d'enrichir au fil des années.
Aujourd'hui, il publie ce recueil dédié à son père, perpétuant ainsi le
souvenir de ses parents.
Extrait du livre :
A toi, Papa.
La première anecdote dont je me souviens, c'est toi qui me l'as contée.
Bon vivant, joyeux drille, tu adorais les soirées entre amis.
Plus tard, devenu adolescent, puis jeune homme, je préférais, bien sûr,
celles avec les miens et j'ai gardé des souvenirs confus des histoires
que vous vous échangiez. Il n'en reste que quelques-unes, glanées
par-ci, par-là.
Je devais avoir six ou sept ans et tu me parlais de l'homme qui
réprimandait son fils.
«Qu'est-ce que c'est que ce bulletin ? Sais-tu qu'à ton âge, Napoléon
était premier de sa classe» ?
«Oui», rétorqua le fils, «mais au tien, il était empereur...».
Tu étais parti très jeune, à dix-sept ans, au Congo belge. Tu y étais
resté de 1928 à 1934. J'ai été stupide de ne jamais m'intéresser à ton
histoire, de ne pas te poser de questions. Que d'échanges aurions-nous
pu avoir, toi et moi, et comme je le regrette maintenant !
Tu m'avais confié que tous les jeunes d'Elisabethville, le travail
achevé, se retrouvaient dans un café-hôtel tenu par un Grec, Makris.
Un jour quelqu'un, était-ce toi ? Trouva, au fond de sa tasse, un
cafard. Dégoûté, il appela le tenancier :
Bré (interjection grecque) Makris, regarde ce qu'il y a dans le café ?
Celui-ci, sans se démonter, pince-sans-rire, répondit :
Pour cinquante centimes, que veux-tu que je mette : un éléphant ?
Quarante ans après, tu en riais encore.
En 2005, près de trois quarts de siècle plus tard, elle m'amuse autant.
Je t'ai perdu le 22 février 1972. Aujourd'hui, alors que j'ai dépassé
ton âge, j'aime à t'imaginer jeune homme, avec tes amis, tous disparus
maintenant, attablés à cette terrasse, sous un flamboyant aux fleurs de
feu, riant à gorge déployée de la réponse à celui qui a retiré ce
cancrelat de la tasse...
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Prokosch tenait particulièrement à ce roman (son dernier, paru en 1972
- et d'abord traduit sous le titre mon immense amérique), oú son âme
cosmopolite rappelait aux lecteurs distraits qu'il se sentait aussi
profondément américain. Mais à sa façon à lui, qui pour notre bonheur
ne ressemble à aucune autre. Nous sommes dans l'amérique du début du
xxe siècle, celle des romans désenchantés de jack london, et nous
suivons l'itinéraire - assez déboussolé - d'une petite frappe du nom de
pancho krauss : un gamin tôt voué à l'errance, qui sillonne le pays en
quête non tant d'aventures (il en aura pourtant son content, point
toujours faciles à avaler) que d'une improbable et peut-être
introuvable identité. Un grand roman inoubliable qui s'était laissé
oublier.
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Le président Obama, si populaire dans le monde, peut-il être perçu
comme le porte-parole d'une gauche européenne progressiste ? Bien sûr
sa politique économique ne tombe pas dans les travers du néolibéralisme
cher à l'équipe de George W. Bush et personne n'oserait suggérer que sa
politique sociale s'identifie à celle de John McCain. Toutefois, le
positionnement du parti démocrate sur l'échiquier politique n'est pas
transposable en Europe. En témoigne le soutien majoritaire de Wall
Street au candidat démocrate.
Guy Spitaels entend avant tout resituer le débat au niveau
international. Pour lui, les deux candidats voulaient l'un comme
l'autre maintenir la domination mondiale des États-Unis, leurs
différences se marquant essentiellement au niveau de la tactique,
unilatéraliste chez McCain et plutôt multilatéraliste chez Obama. Selon
ses propres dires, le 44e président des États-Unis entend jouer le rôle
de shérif du monde.
Par ailleurs, si la crise économique occupe le centre des
préoccupations actuelles, les enjeux géopolitiques n'en demeurent pas
moins. Le programme
nucléaire iranien se poursuit allègrement, l'Irak n'est apaisé qu'en
apparence
et le binôme Afghanistan-Pakistan se révèle plus inquiétant que jamais.
Or, ce grand Moyen-Orient, dont on n'oubliera pas le conflit
israélo-palestinien, reviendra nécessairement en force. De plus, la
Russie a retrouvé ses couleurs d'antan tandis que la Chine multiplie
ses succès.
Face à ces défis, le président Obama, sous l'emprise d'intérêts privés
et publics qui l'entourent, saura, convaincu du destin exceptionnel des
États- Unis et hostile donc à la multipolarité, intervenir en guerrier.
À l'instar de tous ses prédécesseurs.
Guy Spitaels est ministre d'État et professeur honoraire à l'Université
libre de Bruxelles. Dans le domaine des relations internationales, il
fut président de l'Union des partis socialistes européens et professeur
au collège d'Europe à Bruges. Il est aussi président d'honneur de
l'Internationale socialiste et membre du Conseil d'administration de
l'Institut des relations internationales.
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