« Au petit jour, la rumeur jaillit et agite la foule : le roi est entré dans Jérusalem par la porte de Jaffa ! Il emprunte les ruelles qui mènent à l’arche de Robinson, en gravit les marches, débouche sur l’immense esplanade du Temple, un bouquet à la main, des sandales de papyrus aux pieds, vêtu d’une toge blanche. Ce 15 de Tichri de l’année 3801, les pèlerins ne viennent pas simplement célébrer Soukkhot, la fête des Tabernacles, des Moissons et des Vendanges, mais approcher, voir, toucher, se prosterner devant un des leurs, le premier à régner sur la Palestine depuis près de quarante ans, Marcus Julius Agrippa. » Petit fils d’Hérode, intime de quatre empereurs romains (Auguste, Tibère, Caligula et Claude), disciple du philosophe Philon d’Alexandrie, père de Bérénice (célébrée par Racine et Corneille), Agrippa est le dernier roi des Juifs. Prince à la vie dissolue, il connaît les fastes et les honneurs, la misère et la solitude. Roi, il permet à son peuple de vivre uni, libre et en paix pour la première fois de son histoire. Après sa mort tragique en 44, un million de Juifs périssent dans la guerre avec Rome, la Judée est rayée de la carte.
Jean-Claude Lattès, fondateur des éditions qui portent son nom, a vécu, sur les traces d’Agrippa, à Alexandrie, Jérusalem et Rome.
Kamal Jann, Syrien de 40 ans, avocat d’affaires à Manhattan, est un mystère. Sa réussite professionnelle recouvre son drame : son oncle, chef des services de renseignements syrien, homme redoutable et redouté, a fait tuer ses parents quand il avait 12 ans, mais il a aussi financé ses études à New York. Quand, début septembre 2010, la CIA l’avertit que son frère djihadiste, resté en Syrie, va commettre un attentat terroriste à Paris, Jann comprend qu’il va devoir cette fois s’engager dans la toile d’araignée des services secrets occidentaux pour faire tomber son oncle et le pouvoir syrien. Un roman puissant et sombre. Entre Damas, Beyrouth, New York ou Paris, une mosaïque de personnages liés par des relations ambiguës où le pouvoir, le désir, la manipulation, la survie poussent leurs pions sur un échiquier dément et sanglant. Une chorégraphie puissamment orchestrée où violence, trahison, peur, lâcheté, mensonge et corruption rendent impossible le moindre règlement politique au Moyen-Orient tant que les dictateurs en place serviront les intérêts de tous ceux qui ont le pouvoir en ce monde. Kamal Jann est le produit de ces interactions, de cette schizophrénie arabe, de cette conscience éclatée, pour qui l’appartenance au clan, la révolte et la liberté sont incompatibles. Née à Beyrouth en 1953, Dominique Eddé est romancière, essayiste. Intellectuelle engagée, elle participe à de nombreux débats sur le Moyen Orient et vit entre France, Liban et Turquie. Dernier ouvrage, Le crime de Jean Genet (Seuil, 2007).
L'ouvrage lui a été demandé avec insistance par l'abbé Séguin, son confesseur. Il retrace en quatre livres la jeunesse mondaine, la maturité austère et la vieillesse d'un religieux du XVIIIème siècle qui bouleversé par la mort d'une femme aimée s'est converti à 37 ans puis retiré à La Trappe, et qui par son apostolat, sut restaurer dans son monastère la plus stricte observance de la règle. Chateaubriand retrouve, à chaque étape de cette existence, une image de sa propre vie : mêmes rêves d'aventures, même expérience de la douleur, mêmes remords, même désir de conversion. La pensée de la mort hante l'ouvrage comme elle hante Chateaubriand vieillissant. Trop peu minutieux sur le plan historique, il parlait autant de l'auteur que de Rancé. Égrenant les confidences et les souvenirs, ressuscitant trop bien les prestiges et l'esprit du Grand Siècle, l'ouvrage est effectivement plus d'un conteur que d'un pénitent, et c'est là son charme. Mais on a tort de le croire d'un vieillard épuisé qui jette en désordre ses dernières pensées. Fidèle à sa méthode consistant à regarder le passé pour comprendre le présent et y lire l'avenir, Chateaubriand tente une ultime confrontation de son temps avec le XVème siècle. Le parallèle entre Louis XIV et Napoléon s'affine, les comparaisons abondent, les jugements se font plus tranchés que jamais. Le portrait du Cardinal de Retz, « vieil acrobate mitré, prétendu homme d'État [qui] ne fut qu'un homme de trouble », est un prétexte pour satisfaire une vieille rancoeur contre Talleyrand. Le monde moderne n'est pas toujours inférieur au siècle de Louis XIV « nous n'allons pas à la cheville de ces gens-là », néanmoins Madame Sand l'emporte sur Mademoiselle de Scudéry ; mais hélas, « [elle] fait descendre sur l'abîme son talent », et « l'insulte à la rectitude de la vie ne saurait aller plus loin ». La nostalgie du temps passé, si elle existe ici, puise dans le dégoût du monde moderne. Des images étonnantes surgissent, et créent un univers fantastique : les surréalistes se l'approprieront. « La vieillesse est une voyageuse de nuit : la terre lui est cachée ; elle ne découvre plus que le ciel. ». La Révolution est une « piscine de sang où se lavèrent les immoralités qui avaient souillé la France ». Par-delà son époque, c'est encore la vie que contemple et juge le vieil écrivain. Des leitmotive des Mémoires sont repris : l'amertume de survivre, la fausseté de l'amour, la vanité du bonheur -ce qui n'empêche pas le souvenir nostalgique des jours heureux et des femmes aimées de passer parfois dans ces pages.
Deuxième Génération n’est pas un règlement de comptes avec un père ni avec l’histoire. C’est une tentative pour expliquer une enfance dans l’ombre de la Shoah. Michel Kichka, à travers des anecdotes formidables et des souvenirs aussi tragiques que précis, retisse la toile familiale de cette maison installée au cœur de la Belgique industrielle. Récit autobiographique d’une vie qui porte la douleur des siens, mais qui mesure l’urgence de s’occuper de ses besoins : celui de partir à l’âge de dix-huit ans, selon l’auteur, sur une « terre vivante ».